En 2025, une tentative de réforme portant sur la TVA des auto-entrepreneurs a déclenché un vif débat au sein de l’écosystème entrepreneurial français. Le projet, qui visait notamment à abaisser le seuil de franchise en base de TVA, a été accueilli avec inquiétude par les professionnels concernés, avant d’être finalement abrogé. Afin de mieux comprendre les raisons de ce revirement, cet article retrace les étapes clés de cette réforme avortée, les réactions qu’elle a suscitées ainsi que les perspectives futures pour les micro-entrepreneurs en France.
Contexte et Objectifs de la Réforme Initiale
Le gouvernement français a, en 2025, initié une large réforme du régime de la TVA pour les auto-entrepreneurs. Le principal objectif affiché était de simplifier le paysage fiscal et de garantir une plus grande équité entre les différents statuts juridiques des entreprises. Cette simplification passait entre autres par une volonté d’aligner les seuils de franchise en base de TVA à l’échelle européenne. Le projet de réforme prévoyait donc de ramener le seuil de franchise à 25 000 euros de chiffre d’affaires annuel, contre des plafonds bien plus élevés auparavant, allant jusqu’à 77 700 euros pour les activités de vente de biens.
Les autorités mettaient en avant plusieurs arguments économiques : limiter les distorsions de concurrence entre les petits entrepreneurs et les entreprises assujetties à la TVA, faciliter la traçabilité fiscale, et encourager les auto-entrepreneurs à évoluer vers des statuts plus pérennes à mesure qu’ils développaient leur activité. En adaptant ce seuil, le gouvernement espérait aussi harmoniser les règles fiscales françaises avec celles d’autres pays européens, notamment l’Allemagne et la Belgique. Enfin, cette réforme visait à anticiper les évolutions de la directive européenne sur la TVA, qui pousse les États membres à davantage de cohérence dans la fiscalité applicable aux petites entreprises.
Réactions et Mobilisation des Auto-Entrepreneurs
Les réactions à cette réforme ont été immédiates et majoritairement négatives au sein de la communauté des auto-entrepreneurs. Nombreux sont ceux qui ont vu dans cette mesure un risque d’augmenter considérablement leur charge administrative. Sous le nouveau seuil, les auto-entrepreneurs auraient été contraints de s’enregistrer à la TVA, de facturer la taxe à leurs clients, de déclarer et reverser la TVA collectée, et de tenir une comptabilité beaucoup plus rigoureuse. Pour beaucoup, cela représentait une rupture avec la simplicité qui faisait l’attrait du statut d’auto-entrepreneur.
Nombre d’acteurs ont aussi dénoncé un impact négatif sur leur compétitivité, notamment dans les secteurs où les clients sont des particuliers non assujettis à la TVA. La hausse des prix liée à l’application de la TVA risquait en effet de pénaliser ces professionnels face à la concurrence. Les organisations représentatives, telles que les syndicats indépendants et les associations d’entrepreneurs, ont rapidement relayé ces inquiétudes. Certaines ont organisé des manifestations dans les grandes villes, rassemblant des centaines de professionnels touchés par la mesure. Des pétitions ont également circulé en ligne, atteignant plusieurs dizaines de milliers de signatures. La pression médiatique et politique s’est accentuée, forçant le gouvernement à réagir rapidement face à cette fronde populaire inattendue.
Suspension et Concertation Gouvernementale
Face à la montée des tensions et à la mobilisation croissante des auto-entrepreneurs, le gouvernement a décidé en février 2025 de suspendre temporairement la mise en œuvre de la réforme. Cette décision est intervenue après plusieurs rassemblements importants et une véritable levée de boucliers de la part des principaux représentants du secteur. La suspension, présentée comme une mesure d’apaisement, visait à ouvrir une nouvelle phase de concertation avec les acteurs concernés.
Le ministère de l’Économie a ainsi mis en place une série de tables rondes associant les organisations professionnelles, les représentants des plateformes numériques, des experts-comptables, ainsi que certaines associations de consommateurs. L’objectif était de réévaluer collectivement les impacts de la réforme et d’examiner des pistes d’ajustement. Plusieurs propositions ont émergé lors de ces discussions, comme la mise en place d’un plafond transitoire, l’instauration d’accompagnements administratifs ou la création d’un guichet unique simplifié pour la déclaration de TVA. Toutefois, malgré une volonté affichée de dialogue, les divergences restaient fortes quant à la faisabilité d’une telle réforme sans mettre en péril le modèle même de l’auto-entrepreneuriat. Ces tensions persistantes ont jeté le doute sur la capacité du gouvernement à relancer le projet sous une forme acceptable pour tous.
Abrogation de la Réforme par le Parlement
Le processus législatif a connu un tournant décisif à l’automne 2025. Suite aux travaux de la commission des Affaires économiques et aux consultations publiques, un consensus politique s’est dégagé en faveur de l’abrogation pure et simple de la réforme. Plusieurs groupes parlementaires, y compris de la majorité présidentielle, ont estimé que la réforme était mal calibrée et risquait d’entraver le développement de milliers de micro-entreprises encore fragiles.
En octobre 2025, l’Assemblée nationale a voté à une large majorité en faveur de l’abrogation de la mesure, arguant notamment que le système d’auto-entrepreneuriat devait conserver sa simplicité originelle. Les débats ont mis en lumière un besoin impérieux de réformes plus proportionnées et mieux articulées à la réalité du terrain. Cette décision a également été justifiée par l’absence d’étude d’impact exhaustive lors de la présentation initiale de la réforme. D’un point de vue juridique, l’abrogation a permis de rétablir immédiatement les anciens seuils de franchise en base de TVA, sans nécessiter de démarche individuelle de la part des auto-entrepreneurs. Elle a également mis fin aux obligations déclaratives supplémentaires qui s’apprêtaient à entrer en vigueur, confirmant une volonté politique de préserver la stabilité du régime des micro-entreprises.
Conséquences pour les Auto-Entrepreneurs
Avec l’abrogation de la réforme en octobre 2025, les auto-entrepreneurs ont retrouvé un cadre fiscal qu’ils connaissent bien. Le maintien des anciens seuils de franchise en base de TVA permet aux professionnels de conserver leur mode de fonctionnement initial, sans avoir à adapter leurs logiciels de facturation ni à se former aux mécanismes complexes de la TVA.
Sur le plan pragmatique, cette décision a également favorisé un climat de stabilité fiscale, essentiel pour de nombreux professionnels dont les marges sont restreintes. De nombreuses fédérations métiers ont salué cette victoire comme une reconnaissance du rôle central que jouent les micro-entrepreneurs dans le tissu économique local. Toutefois, certains acteurs du débat public estiment que des ajustements restent nécessaires, notamment pour éviter les abus et mieux encadrer la croissance rapide de certaines activités avec un statut censé être transitoire.
Des pistes à l’étude incluent un renforcement progressif de l’accompagnement vers la sortie du régime pour les entrepreneurs atteignant un certain seuil, ou encore une modulation des obligations fiscales en fonction du secteur d’activité. Si aucune nouvelle réforme n’est annoncée pour l’instant, le sujet reste sur la table dans les couloirs des ministères et des assemblées, sous une forme possiblement plus nuancée.
Leçons Tirées et Perspectives d’Avenir
De cette séquence législative mouvementée, plusieurs enseignements peuvent être tirés. Pour les décideurs politiques, il est clair qu’une réforme, même motivée par des objectifs économiques ou d’harmonisation européenne, ne peut ignorer les réalités du terrain et les spécificités de certains régimes comme celui des auto-entrepreneurs. La concertation ne doit pas être une formalité, mais bien un processus anticipé et structurant, permettant d’identifier les impacts concrets avant la mise en œuvre d’une réforme.
Côté auto-entrepreneurs, cet épisode a également mis en relief leur capacité de mobilisation. Leur voix, souvent dispersée, a su s’unir de façon efficace pour interpeller les autorités, démontrant que les formes de travail indépendant doivent être pleinement intégrées dans le dialogue social. Pour l’avenir, plusieurs recommandations pourraient éviter de telles crispations. Il est ainsi souhaitable de mettre en place des groupes de travail permanents réunissant fonctionnaires, experts et représentants d’auto-entrepreneurs pour accompagner chaque étape d’une éventuelle réforme.
Enfin, une approche par secteur et par niveau d’activité semble plus juste qu’une règle unique, afin de répondre aux besoins divers du vaste univers des auto-entrepreneurs en France.
Conclusions
L’abrogation de la réforme de la franchise en base de TVA en 2025 illustre l’importance d’une approche concertée entre l’administration fiscale et les professionnels concernés. Cette décision a permis de préserver les fondements du statut d’auto-entrepreneur, tout en rappelant que toute évolution fiscale doit s’inscrire dans une logique de soutenabilité économique. Pour les années à venir, il sera essentiel de bâtir des réformes fondées sur l’écoute, la transparence et la progressivité, afin d’accompagner les micro-entreprises dans leur développement, sans compromettre la simplicité qui fait leur succès.

